Dans mon premier journal de bord de 2008, j’ai retrouvé cette note :
« Je me demande où les gens qui voyagent seuls trouvent cette force. Cela doit être horriblement dur. Je ne m’en sens pas du tout capable. »
Les choses ont bien évolué depuis mon premier voyage au long cours. C’était il y a 8 ans. Avec mon pote Nicolas, on s’était fait une promesse. Si on est recalé en Master, on part en Australie. Le résultat ne s’est pas fait attendre. Je m’envole au soleil sans rien avoir préparé, me contentant de suivre mon camarade qui rêvait du pays des kangourous. Pour tout vous dire, j’étais un néophyte du voyage en sac à dos. J’étais même parti avec une valise remplie de mes affaires d’hiver (voir mes conseils sur comment faire son sac à dos). Je n’avais pas compris que les saisons étaient inversées et que je m’apprêtais à connaître les températures les plus chaudes de la planète. J’ai passé 7 mois en Australie et ce furent les 7 mois les plus décisifs de ma vie. J’avais 21 ans et je n’étais encore qu’un enfant. Je n’avais jamais quitté la maison de mes parents ni jamais vraiment travaillé. Ma pensée a évolué et j’ai grandi. Ce qui m’a le plus marqué, c’est ce sentiment de liberté qui ne m’a pas abandonné de tout ce voyage. J’étais devenu responsable de tous mes faits et gestes. Seul moi pouvais décider de la direction que je voulais prendre. Nous étions au final 4 amis français – Joffrey, Nicolas, Youri et moi – insouciants et heureux d’être ensemble. On croquait la vie à pleines dents et la vie nous le rendait bien. Nous étions comme des frères, des « BROZ ».
Nous dormions tous les 4 dans un van que nous avions acheté pour l’occasion. Les deux premiers mois, nous avons travaillé dans les champs en fonction des besoins des fermiers : ramasser des prunes, castrer du maïs, cueillir des pêches. Même si le travail était éreintant, on était loin de se plaindre. L’ambiance était géniale, comme en colonie de vacances et on était déterminé à mettre suffisamment d’argent de coté pour crapahuter dans toute l’Australie. Au final, nous avons traversé le pays de bas en haut. Nous avons fêté notre retour à la civilisation à Melbourne, découvert la beauté de la Tasmanie, avec ses presque-iles et ses montagnes verdoyantes. Nous avons approché des Kangourours de toutes tailles, des Koalas, des Dingos, des diables de Tasmanie et même caressé un Walibi sauvage. Nous nous sommes émerveillés devant les falaises des 12 Apôtres longeant la route des Vins, nous nous sommes prosternés devant le plus célèbre des rochers, Uluru, et sa couleur ocre si particulière lorsque le soleil se couche. Nous avons sillonné le désert sur une route rectiligne de plus de 2000 km avec pour seul paysage l’horizon rouge. Nous nous sommes baignés dans la grande barrière de Corail entourée de dizaines de poissons et avons surfé à Bondi Beach, la plage de Sydney la plus connue du monde. Ce que j’ai préféré de ces 8 mois en Australie ? Ce n’est ni les paysages, ni les expériences, mais cette belle histoire d’amitié, celle de 4 gaillards vivant tout un tas d’aventures et de galères dans un esprit fraternel.
Durant notre voyage, nous parlons souvent de notre futur retour à une « vie normale » : reprendre nos études et trouver un « vrai » métier dans notre branche. Comme ci, ce que nous étions en train de faire, c’est-à-dire enchainer entre petits boulots et voyage, ne faisait pas partie de la vie dite « normale ». Pourtant, on pourrait suivre ce rythme toute notre vie, trouver du travail ici et là, afin de vivre sur les routes du monde pendant des années. J’ai croisé des centaines de voyageurs au long cours et leur sourire en dit long sur leur situation. C’est sûr que lorsqu’on habite en France, on n’en rencontre pas beaucoup des backpackers ayant ce rythme de vie. On est plus habitué à des profils classiques, moulés par notre société occidentale, avec un idéal de vie défini pour nous. L’objectif étant d’avoir un CDI, une maison et d’être en couple. On essaye tous malgré nous de répondre à ces diktats. C’est ancré au plus profond de nous et s’en détacher est épuisant. On nous rappelle sans arrêt ce qu’on est censé faire. Le but n’est pas de rejeter ce qui nous est imposé, mais de faire un véritable choix en connaissance de cause. Savoir que d’autres chemins sont possibles est primordial. Voyager et se confronter à des vies différentes de la nôtre permet de comprendre qu’il existe une infinité de routes possibles. C’est une graine qui se plante dans notre esprit et qui ne fait que germer.
Le retour en France à une vie « normale » n’a pas été évident. Quand on vit des trucs aussi forts, on est marqué en profondeur. Ce voyage ne devait être qu’une parenthèse d’une vie bien rangée. Il était en fait le premier chapitre d’une vie différente du schéma classique. La graine avait bien poussé depuis l’Australie et j’avais eu le temps de réfléchir au sens que je voulais donner à ma vie. Alors, dès que j’en ai eu l’occasion, je suis reparti…
Ceci est un extrait de mon futur livre : sortie prévue fin Juin
Commentaires
J’ai adoré ! J’ai encore plus hâte de le lire maintenant ^^ Mais va à ton rythme, il vaut mieux ça que sortir un livre baclé 🙂
Très intéressant. On peut vivre toute sa vie libre sans attaches (sans trop en tout cas) et parcourir le monde. Mais le voyage, ou en tout cas la découverte du monde, peut aussi s’accommoder d’une vie de famille, d’une vie plus classique. Nous avons choisi l’expatriation en famille et c’est aussi bien cool de voyager tous ensemble. Ca fait des souvenirs.
Bon vent à toi.
Son dernier article : Maupiti: vie paisible, raies manta et lagon bleu